Les études scientifiques et le corps médical s’accordent pour noter l’importance de la pratique régulière d’une activité physique. Elle va aider à mieux supporter les effets secondaires des traitements (exemple : la sarcopenie qui est une fonte musculaire induite par la chimiothérapie) et à lutter contre la fatigue.
Elle diminue le risque de récidive, améliore la qualité de vie et agit sur un éventuel lymphœdème en limitant la prise de poids. L’activité physique peut se pratiquer à toutes les étapes du parcours de soins, de façon régulière et progressive. Votre corps doit se ré-athlétiser en endurance et en force musculaire. Attention, il peut y avoir des contre-indications à la pratique sportive, il est donc important d’en parler à votre oncologue et de vous faire suivre par votre kiné qui vous proposera des séances d’activités physiques adaptées à votre parcours. Vous pouvez également télécharger notre livret de rééducation gratuitement. Ce guide rédigé par des kinés sénologues vous permettra de remettre votre corps en mouvement en suivant les étapes de votre parcours de soin et en fonction de vos traitements.
L’activité physique est votre meilleur allié pendant et après les traitements, ainsi que de façon régulière tout au long de votre vie.
Y a-t-il des contre-indications à l’activité physique ?
La première contre-indication reste lié au temps de cicatrisation nécessaire avant de mettre en tension une cicatrice ; en effet ce tissu reste délicat et fragile pendant plusieurs mois même une fois qu’elle est fermée. En cas de reconstruction il y aura le lambeau, l’implant, les points d’ancrage d’un sillon sous-mammaire, voire la graisse injectée qui constitueront autant de zones de fragilité donc d’éléments à respecter : le chirurgien vous donnera ses consignes et votre kinésithérapeute devra être capable de les adapter aux exercices qu’il vous proposera. S’il vous a aidé à retrouver le chemin de l’AP en vous ré-entrainant et en vous apprenant à protéger vos zones fragiles alors vous pourrez continuer seule sans risque pour celles-ci.
Il est impossible de dire à l’avance en combien de temps vous allez récupérer d’une chirurgie, ablation de tumeur, du sein, de ganglions ou reconstruction et donc à partir de quand reprendre telle ou telle activité physique.
La chimiothérapie quant à elle peut entrainer des contre-indications dues au fait que votre immunité peut être affaiblie. Si vous êtes en neutropénie ou en aplasie, attention à ne pas fréquenter des lieux où vous pourriez rencontrer des bactéries ou des virus. Par exemple une salle de gym avec d’autres personnes qui toussent ou éternuent n’est pas un lieu à fréquenter tant que vos capacités de défense ne se sont pas améliorées ; la piscine avec le risque de croiser des bactéries n’est peut-être pas non plus le lieu idéal et ce d’autant plus que la zone du cathéter peut aussi constituer une porte d’entrée aux bactéries si elle n’est pas correctement protégée. Si ces conditions sont respectées alors commencer l’AP le plus tôt possible quand vous êtes en chimiothérapie néoadjuvante est capitale pour éviter que des déficits comme la fonte musculaire ne s’installent de manière trop prononcée.
Pendant la radiothérapie c’est la peau qui peut poser problème car les rayons et l’érythème qu’ils provoquent la rendent fragile et sensible ; le chlore des piscines, le sel de l’eau de mer, les rayons du soleil seront autant d’éléments à éloigner de cette zone. Une fois la radiothérapie terminée, c’est la cicatrisation de la peau totalement obtenue qui autorisera la reprise des bains en piscine ou en mer à la condition de bien la rincer, de bien l’hydrater après coup. En revanche pendant la radiothérapie qui amène souvent son lot de fatigue, continuez à marcher, à faire votre AP habituelle, cela vous aidera surement à mieux récupérer ensuite.
Enfin la survenue d’une infection, une fatigue extrême, l’apparition d’une métastase, une anémie, de la fièvre, d’une douleur inhabituelle, etc. seront autant de circonstances qui devront vous orienter vers un médecin ; ces contre-indications temporaires seront traitées et vous pourrez reprendre votre entrainement. Une péricardite par exemple vous impose un temps de restriction de votre AP surtout si celle-ci est dynamique et fait monter votre fréquence cardiaque. Mais en attendant que le traitement de la péricardite fasse son effet demandez à votre cardiologue si vous pouvez au moins, marcher, faire quelques étirements, quelques efforts musclants, de façon à ne pas perdre totalement votre condition physique.
Pendant votre parcours de soin il se peut que vous rencontriez des contre-indications à la pratique d’AP. Celles-ci sont rarement définitives ; dès qu’un signe inhabituel apparaît, prenez l’habitude d’en parler avec votre médecin afin qu’il puisse mettre en place une stratégie thérapeutique. Vous pourrez reprendre alors votre AP au plus vite avec parfois des adaptations simples de l’AP et de chacun des gestes, de leur intensité et du nombre de répétitions.
Comment savoir si une activité physique est adaptée à mon cas ?
Il faut d’abord revenir aux recommandations officielles concernant l’activité physique (AP) pendant ou après un cancer : l’idéal serait de mêler dans la semaine des activités endurantes, d’autres qui renforcent les muscles et enfin des exercices qui assouplissent.
Les actions endurantes et musclantes auront un effet sur le métabolisme (gestion de la graisse corporelle en complément de l’alimentation), sur la gestion de l’insuline et des œstrogènes, sur la solidité du squelette, sur la fatigue, sur l’immunité, sur les douleurs…
Les actions assouplissantes permettront de lutter contre les raideurs articulaires, les douleurs, le vieillissement de la posture ou la sédentarité.
Le tableau suivant vous propose un classement en fonction des 3 critères principaux de l’AP (E=endurante, M=musclante, A=assouplissante), en sachant toutefois que ces informations vous sont données avec l’idée que vous pratiquez l’activité en question dans les règles de l’art.
Activités E M A Précautions Yoga x x Assouplissement et renforcement musculaire avec une amélioration du schéma corporel, et travail de la respiration. Pilates x x Assouplissement et renforcement musculaire avec une amélioration du schéma corporel, et travail de la respiration. Aqua bike x x Attention aux positions d’appui prolongé des mains en position basse. Marche nordique x x Activité très complète de plein air, facile à pratiquer même seule. Badminton x Jeu avec action unilatérale à compléter par action musclante et assouplissante bilatérale. Tennis x Jeu avec action unilatérale à compléter par action musclante et assouplissante bilatérale. Canoë kayak x x Attention à la place assise dans le bateau si groupe avec deux pagayeuses côté à côte. S’asseoir du côté opéré. Corde à sauter x Attention à bien maintenir les seins, à éviter avant la cicatrisation, apprentissage de la gestion des impacts. Cyclisme x x Attention aux positions d’appui prolongé des mains en position basse. Pétanque Jeu avec action unilatérale à compléter par action musclante et assouplissante bilatérale. Judo, sports de combat x x À choisir de préférence quand le sport a été pratiqué avant le diagnostic. Escrime x x Jeu avec action asymétrique à compléter par action musclante et assouplissante bilatérale. Rugby x Jeu, émulation du groupe, notion de compétition ; doit être complété par des exercices d’assouplissement. Longe côte x x Activité très complète de plein air, contre la résistance de l’eau, forte action métabolique. Aqua gym x x x Importance de l’action résistante, drainante et métabolique de l’eau, à réaliser avec contrôle du corps et respiration adaptée. Qi Gong, Tai Chi x x Assouplissement et renforcement musculaire avec une amélioration du schéma corporel. Gym posturale x x Assouplissement et renforcement musculaire avec une amélioration du schéma corporel. Sport en salle, fitness x x x Intéressant en progression et en choisissant la direction idéale des gestes à renforcer. Aviron x x x Activité adaptée, geste à apprendre absolument avec un professionnel formé. Si vous avez tendance à ressentir des douleurs dans la zone de la poitrine, sous le sein, si votre épaule vous paraît difficile à mobiliser avec une sensation de raideur dans cette zone alors votre kinésithérapeute est le plus à même de vous donner des consignes d’exercice pour étirer et assouplir votre muscle pectoral ; cela vous aidera aussi à limiter vos douleurs.
Que penser de l’activité physique aquatique ?
Les activités dans l’eau offrent souvent un renforcement musculaire car il faut lutter contre la résistance de l’eau en particulier lorsque l’on se déplace (marche dans l’eau, longe côte) ou que l’on déplace un segment de membre (aquagym, aquatraining). En revanche faire des mouvements dans l’eau peut être facilité par la poussée d’Archimède qui allège le poids (à utiliser par exemple lors d’une faiblesse extrême ou en cas de fragilité osseuse) et peut aussi améliorer le drainage lymphatique et le retour veineux (le mouvement de l’eau autour des membres agit comme un super drainage).
Si la température de l’eau est plutôt fraîche, alors notre métabolisme est activé et la dépense calorique est augmentée par rapport à une activité hors de l’eau ; à privilégier donc si la perte de graisse est nécessaire, en particulier dans le cas où une obésité sarcopénique est présente (graisse au niveau du ventre due à la fonte des muscles concomitante de la chimiothérapie et/ou de l’hormonothérapie). Cette obésité sarcopénique (augmentation du tour de taille) est aussi le fait du déconditionnement musculaire c’est à dire la fonte des muscles qui existe chez beaucoup de femmes par manque d’utilisation et en raison du vieillissement naturel.
Et la fatigue dans tout ça ?
Il est important de distinguer la fatigue cancéro-induite de la fatigue due à toutes sortes de raisons. Lorsque vous vous plaignez d’être fatiguée avant, pendant ou après le parcours du traitement du cancer, les médecins qui vous suivent doivent d’abord éliminer toute cause de fatigue : une anémie, une infection, une dénutrition, un manque de sommeil (par exemple à cause des bouffées de chaleur), une déprime ou une dépression, des complications telles que des métastases, la présence de comorbidités (autre maladie concomitante) ou de douleurs non soulagées qui se manifestent la nuit et vous empêchent d’avoir un sommeil récupérateur. Une fois toutes ces complications écartées, on pourra étiqueter votre fatigue de cancéro-induite pour signifier qu’aucune autre cause n’a été identifiée.
Il est important d’identifier le moment où cette fatigue apparaît et voir si elle n’est pas due à un effort trop important (reprise trop rapide et trop intense de votre AP préférée) car surcharger vos muscles, vos tendons et vos articulations peut générer de l’inflammation qui produit alors de nouvelle cytokines…
Éviter de s’auto-médiquer c’est à dire de prendre des médicaments ou des boosters d’énergie (vitamines, café, toutes sortes d’excitants) qui ne sont pas adaptés à votre état de santé et ne résoudront pas votre problème.
Choisissez de traiter cette fatigue par l’AP qui est aujourd’hui le seul traitement validé de la fatigue cancéro-induite. Même si cela peut paraître paradoxal, on sait que nos muscles en se contractant produisent des substances qui vont aller combattre les cytokines qui vous fatiguent. L’exercice physique a aussi une action anti-inflammatoire, drainante, assouplissante qui aide à débarrasser votre corps des résidus des traitements agressifs.
En résumé, la fatigue se combat par l’activité physique progressive et dosée.
Quel sport pratiquer quand on a un lymphœdème ?
Aujourd’hui, de nombreuses études scientifiques ont démontré que même avec un lymphœdème et d’autant plus qu’il est pris en charge précocement, il est bénéfique de s’activer physiquement et globalement : pour cela la marche ou la marche nordique, le vélo, le rameur, les escaliers, la natation, l’aquagym seront des activités conseillées. En parallèle des exercices activant le membre concerné seront utiles et ils seront réalisés sans quitter la contention, le manchon ou le bandage. Enseignés par le kinésithérapeute ces exercices auront pour objectif le renforcement des muscles contre des élastiques ou des haltères avec en parallèle la remise en charge de la main et du membre supérieur du côté opéré qui devront peu à peu supporter le poids du corps.
Des exercices dans l’eau (aquagym, aquatraining, longecote, natation) ont l’avantage de procurer un drainage grâce au mouvement de l’eau autour du membre supérieur tout en musclant le membre supérieur voir en augmentant la dépense énergétique globale du corps dans un environnement plus frais que la température du corps. Ces activités sont donc idéales dans le cadre de la prise en charge du lymphœdème du membre supérieur, voir du membre inférieur.
Peut-on faire du renforcement musculaire après une opération du sein ?
Pendant longtemps on a considéré que soulever des charges était interdit aux femmes opérées d’un curage axillaire et que même lorsque la cicatrisation était obtenue, les charges permises étaient limitées pour toute la vie.
Non seulement les chirurgies ont changé et un curage d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec un curage d’hier (moins délabrant, souvent plus limité du fait de l’existence de la biopsie du ganglion sentinelle) mais les femmes ont de plus en plus accès à la kinésithérapie après la chirurgie. Celle-ci leur permet de juguler la plupart des causes de douleurs évitant l’affaiblissement des membres supérieurs tout en organisant un programme de récupération ou de renforcement musculaire de ceux-ci.
Si cette rééducation est progressive avec une association d’exercices en présence du kinésithérapeute puis réalisés aussi hors de sa présence, et qu’elle est complétée par la reprise d’une activité plus globale, alors il n’y a pas de limite à la récupération.
Le renforcement de vos membres supérieurs contre des élastiques puis contre des poids (haltères, sacs lestés, barre d’haltérophilie, machines de fitness, etc.) mais aussi contre le poids de votre corps, est tout à fait indiqué et réalisable.
La seule limite que vous devez vous imposer est d’être progressive pour ne pas créer de douleurs ou d’inflammation ; vous devez choisir la direction des mouvements pour cibler tel ou tel muscle en rapport avec vos faiblesses, mais aussi votre posture et vos gestes habituels. Et pour cela, les conseils d’un professionnel, kinésithérapeute ou éducateur sportif en activité physique adaptée, seront précieux. Dites-vous bien que si vous soulevez un poids trop lourd par rapport à vos capacités musculaires vous risqueriez de vous blesser (douleurs tendineuses) de malmener votre périnée (fuites urinaires à l’effort) votre abdomen (poussée déformante) et vos lombaires (surcharges de contraintes avec risque de lumbago) bien avant de risquer un lymphœdème.
Donc oui prudence, progression mais surtout pas de limite du moment que vous vous entrainez.
L’activité physique est-elle remboursée dans le cadre du cancer du sein ?
Malgré le terme de « sport sur ordonnance » qui signifie que le médecin peut prescrire une activité physique à toute personne en ALD ou atteinte d’une maladie chronique, il ne faut pas croire que l’AP est prise en charge et remboursée par l’assurance maladie.
Pour obtenir une prise en charge il faut vous adresser à d’autres structures ou institutions :
- Les maisons sport santé présentes dans toute la France sont un lieu où vous pouvez être accompagnées pour la reprise d’une activité adaptée à vos envies, besoins et surtout aux délais en rapport avec la cicatrisation. Les tarifs proposés dans ces MSS bénéficient de l’aide de subventions qui se répercutent donc sur les tarifs qui vous sont proposés. Vous trouverez la liste des MSS sur le site https://www.sports.gouv.fr/decouvrez-les-maisons-sport-sante-les-plus-proches-de-chez-vous-389.
- Certaines mutuelles ou assurances prennent en charge l’AP avec en général des forfaits à l’année et parfois les bilans qui souvent précèdent le début de l’AP ; une liste de ces organismes est régulièrement mise à jour sur le site https://azursportsante.fr/wp-content/uploads/2019/05/Listing-Mutuelles-et-Assurances-qui-remboursent-lAP-v.25.07.2023.pdf
- D’autre part des villes ou des régions, de même que certains comités d’entreprise peuvent participer à la prise en charge de l’AP ; pour être informé rendez-vous dans la mairie de votre lieu de résidence, pensez à vous rendre au forum des associations de votre ville et renseignez-vous auprès de votre entreprise.
Une précision : même si votre kinésithérapeute propose de l’AP dans son cabinet, il n’a pas le droit de facturer ces séances avec votre carte vitale ; il peut même être sanctionné s’il le fait. De ce fait il facturera les séances en dehors de la nomenclature kiné et de la prise en charge par l’assurance maladie ; ses tarifs sont choisis librement mais devront être affichés dans la salle d’attente du cabinet.
Si votre kinésithérapeute est référencé auprès d’un organisme prenant en charge le sport santé alors il se peut qu’il reçoive directement sa rémunération pour l’AP en direct de l’assurance ou de la mutuelle qui la prend en charge. Dans ce cas il se peut que vous n’ayez rien à débourser ou une somme modérée.
Mon sein gonfle après une séance de sport ou de ménage. Est-ce normal ?
Oui il est possible d’avoir le sein gonflé mais tout dépend des gestes sportifs ou du ménage effectué. Pensez à étirer votre muscle pectoral qui est souvent trop sollicité dans les gestes habituels et portez une brassière compressive pour éviter le gonflement.
Je travaille en position debout toute la journée, est-ce mauvais ?
Toute position statique prolongée est déconseillée. Bougez régulièrement. Marchez, faites des talons/pointes, étirez vos bras dans toutes les positions, toutes les heures. Le port de chaussettes ou bas de contention peut également vous soulager si vous avez des problèmes circulatoires.